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L’intégral pour tous ! Ce noble projet, longtemps porté par plusieurs marques de camping-cars, aurait-il du plomb dans l’aile ? Certaines marques ont jeté l’éponge ou réduit fortement leurs ambitions sur ce marché de l’intégral. Après la flambée des prix, la marche d’accès est devenue trop haute pour beaucoup d’acheteurs. Mis à part Itinéo qui tient bon (à partir de 73800 €), l’offre se recentre clairement sur le haut de gamme, au-delà de 90000 € avec l’indispensable boîte de vitesses automatique. D’une manière générale, la part des intégraux dans les immatriculations de camping-cars recule à 9 % en 2024, contre 15 % avant la crise sanitaire. Ce résultat ne présage pas de l’avenir de l’intégral. Le rebond est en cours et les initiatives vont se multiplier.

La hausse des prix, une explication insuffisante

Quoique bien réelle (+20 % en moyenne), la hausse des prix n’est pas suffisante pour expliquer le décrochage de l’intégral. Si c’était le cas, les marques économiques (Itinéo, Sunlight, etc.) devraient en tirer avantage et sur-performer par rapport aux autres. Les chiffres ne confirment pas cette hypothèse. De même, certains intégraux premium continuent à bien se vendre, à l’image du 8096 DF (100000 €), toujours en tête des ventes chez Rapido, la marque spécialiste de l’intégral (entre 40 et 50 % des camping-cars Rapido). Pas de doute, l’intégral a repris sa place dans le haut de gamme. Équipées de la boîte automatique, les séries spéciales Pilote Évidence et Bavaria Nomad rencontrent un indéniable succès.

BAVARIA NOMADE I740FC – Sur les intégraux, un volume à vivre incomparable.

Retour au calme après des années difficiles

Par la voix d’Antoine Gueret, directeur du commerce et du marketing, le Groupe Pilote ne conteste pas le recul de l’intégral, mais le replace dans le contexte. « Durant la crise sanitaire, nous avions toutes les peines du monde à produire de l’intégral, faute d’avoir des châssis nus et des boîtes automatiques, la configuration la plus demandée sur ce type de camping-car. Les fournisseurs ne nous livraient pas ce que nous demandions, ou alors de manière très désordonnée. En conséquence, l’intégral a souffert de délais de livraison à rallonge et d’une moindre exposition chez les distributeurs. Aujourd’hui, les choses vont mieux, heureusement. Il y a de la disponibilité, de la boîte auto et les prix sont stabilisés. Les immatriculations vont remonter, c’est sûr. Pour autant, allons-nous revenir aux chiffres d’avant ? C’est peu probable… », pronostique-t-il.

Des stocks à écouler

La crise traversée a totalement rebattu les cartes. Portés par une très forte demande, beaucoup de professionnels ont investi en masse le marché du van et du fourgon, au-delà parfois du raisonnable, délaissant du même coup le camping-car intégral, plus difficile à vendre auprès des primo-accédants (50 % des acheteurs de camping-car). Comme chacun le sait, les immatriculations sont avant tout le reflet des stocks…

Le très haut de gamme ne connait pas la crise. Hymer Classe B MasterLine I-780, un camping-car intégral d’abord conçu pour de longs voyages en toutes saisons.

Moins de véhicules sur parc = moins de ventes

Alors, l’intégral, avant tout victime d’une crise de l’offre ? L’explication revient en boucle chez les spécialistes du camping-car. Sans compter l’offre réduite chez Challenger et Chausson, d’autres grandes marques ont baissé la voilure sur l’intégral, parmi lesquelles Bürstner, Eura Mobil ou McLouis, dont le catalogue compte actuellement quatre références, contre une quinzaine en 2021. Le ticket d’entrée se négocie aujourd’hui à partir de 83000 € sans la boîte automatique. « C’est vrai, on se recentre sur l’intégral confort de 7,45 m, le cœur de la demande. À ce niveau de prix, les clients ne veulent pas faire de compromis sur les prestations et l’équipement » plaide Julie Carciofi, directrice générale d’Hexacamp, la structure d’importation de la marque italienne McLouis. D’autres marques, à l’image d’Autostar, reprennent timidement la main sur ce segment.

Un plan ambitieux pour l’intégral

L’intégral pourrait-il connaitre le même déclin que la capucine, réduite à la portion congrue dans les immatriculations ? Personne ne veut y croire. Et surtout pas le Groupe Pilote, très engagé sur l’intégral au travers de toutes ses marques. « C’est un segment qui nous tient à cœur et pour lequel nous avons un plan ambitieux sur plusieurs années. On y croit à fond. Nous disparaitrons avec l’intégral, s’il devait disparaitre un jour » sourit Antoine Gueret.

Parmi les champions de l’intégral, on n’oublie pas non plus la marque Hymer qui développa cette classe de camping-cars au début des années quatre-vingt, avec les fameux Classe-B et Classe-S. Le premier Hymer B-544, modèle historique, apparait en 1981. Aujourd’hui, si l’essentiel des ventes se concentre sur le profilé ML-T 580 4×4, Hymer reste une référence sur l’intégral haut de gamme, principalement sur le Mercedes Sprinter, en version traction et châssis rapporté SLC. Les intégraux B-MC se déclinent cette année en série spéciale Black Line.

Même si la hausse des prix freine les familles, la marque Itinéo continue de leur proposer des aménagements dédiés et pratiquement introuvables ailleurs, à l’image du nouveau Famili SBD700 (6,99 m), du CS660 (6,61 m) et de l’indémodable SB740 (7,42 m). Trois camping-cars recarrossés avec lits superposés à l’arrière.

Une expérience unique

L’intégral conserve, quoi qu’il arrive, des avantages concurrentiels par rapport à un profilé : isolation renforcée, vision panoramique, circulation, salon préservé du lit escamotable, etc. « À l’étape, on ne fait pas mieux », clament sans relâche tous ceux qui partent en camping-car intégral. « On ne le dit pas assez. Le voyage en intégral est une expérience unique, très agréable. Un sentiment de volume, d’espace, à nul autre pareil » poursuit Antoine Gueret (Groupe Pilote). Signe que la rupture n’est pas consommée entre les Français et l’intégral, ce type de camping-car continue à bien se vendre sur les salons d’automne.

Reste une question épineuse : comment convaincre les nouveaux utilisateurs de passer à l’intégral ? Si le ticket d’entrée reste élevé, c’est évident, le véhicule conserve dans le même temps une valeur de revente plus importante. « C’est un message difficile à expliquer, mais il faut regarder en priorité le coût d’usage » conseille un professionnel du camping-car.

Une nouvelle génération en marche

À la recherche de la bonne solution, de nombreuses marques promeuvent une nouvelle génération d’intégraux « compacts », dont la largeur réduite lèverait les inquiétudes liées à la conduite d’un intégral. Après les Allemands, champions en la matière, les constructeurs français s’engouffrent sur ce marché. « Notre Série Ci, apparue récemment, suscite beaucoup d’intérêt. Elle renouvelle l’image de l’intégral au travers d’un design différent et d’une ligne plus sportive. C’est un complément de gamme intéressant par rapport aux intégraux de la Série 8 » confie Yann Duru, en charge du commerce chez Rapido. Le mouvement est bien enclenché. D’autres marques ne tarderont pas à réagir, comme elles l’ont fait déjà sur les profilés étroits en reprenant, pour certaines, la même dénomination Série C…

Un « compact spacieux », l’oxymore a de quoi surprendre, mais c’est pourtant bien le sentiment que suscite l’intégral C55i à l’usage.

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Même son de cloche du côté de Dethleffs, où l’historique série Globebus fonctionne toujours bien. Il faut dire que le constructeur allemand pose sur l’intégral un autre regard, beaucoup moins conventionnel que la plupart des autres fabricants. « Au travers de la finition dynamique GT et des trois dispositions uniques ne dépassant pas 7,00 m de long, nous occupons une place à part, sans concurrence réelle sur le marché de l’intégral » confie Eric Calvez, de Dethleffs France. L’ultra-compact Globebus I1 (5,99 m) profite cette année d’un avantage décisif avec l’intégration de la boîte automatique de série.

Des camping-cars plus chers à fabriquer

Sur un camping-car recarrossé, l’essentiel du prix provient non pas de la longueur ou de la largeur, mais de la face avant, dont le développement exige des investissements très importants qu’il faut amortir sur des volumes de production réduits. C’est la raison pour laquelle les intégraux « compacts » ne présentent pas un prix inférieur. Par exemple, sur la collection Rapido 2025, la Série Ci (largeur 2,17 m) est au prix de la Série 8 (largeur 2,35 m). Pour les clients, c’est parfois difficile à comprendre. Ce coût de développement freine aussi le renouvellement régulier des produits.

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ITINEO CM660, le moins cher des intégraux (73800 €)

Le cas particulier d’Itinéo

La marque Itinéo, dont le projet de départ en 2006 était « l’intégral au prix du profilé » conserve un attachement très fort à l’intégral familial et économique, en dépit d’une ouverture au camping-car profilé en 2018, lequel absorbe aujourd’hui 40 % des ventes. Difficile de s’en couper totalement…

Sur le marché de l’intégral économique, Itinéo garde donc la main. Au sein de la gamme Famili Compact (ex-Nomad), apparue en 2021, les intégraux (6,61 x 2,19 m de large) se négocient à partir de 73800 €, sur une base de Peugeot Boxer 140 ch : un budget conséquent, en hausse sensible (25 %) depuis 2021, mais toujours compétitif par rapport à la concurrence, même s’il faut ajouter le pack Life (1190 €). « Le succès de nos intégraux Famili Compact dépend pour beaucoup des régions dans lesquelles ils sont distribués. En Rhône-Alpes, où les clients s’aventurent régulièrement à la montagne, l’intérêt est évident » témoigne Arthur Jan, responsable des ventes de la marque Itinéo.

Au bout du compte, l’intégral n’a pas dit son dernier mot. Au contraire, il porte en germe l’avenir d’un camping-car confortable, spacieux, léger et aux formes aérodynamiques et sportives.

Repenser l’intégral. Tel était le projet de Dethleffs au travers de l’intégral Evan présenté en 2012. Les concepteurs puisaient très clairement leur inspiration du côté des fourgons.

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