Dans la petite station balnéaire de Portorož, au bord de la mer Adriatique qui a donné son nom à la marque, Adria a réuni la crème de la presse camping-car européenne pour présenter ses nouveautés 2023. Nous voilà en Slovénie, petit pays de l’Union Européenne de 2,1 millions d’habitants, dont Adria est un des fleurons industriels.
Nous avons rencontré Matjaž Grm (photo), directeur exécutif des ventes et du marketing. Lors d’un entretien sans fard, il a répondu à nos questions sur la nouvelle gamme Supersonic, les bons résultats de la marque, mais aussi sur les retards de livraisons et les difficultés du secteur.
1) Adria vient de présenter le nouveau Supersonic sur Mercedes , pouvez-vous nous en dire plus sur cette gamme d’intégraux ?
« Supersonic est notre nouvelle gamme d’intégraux, la plus luxueuse. On retrouve le caractère familial de nos modèles Sonic, associé aux performances du Mercedes Sprinter, le porteur de camping-cars le plus perfectionné actuellement. Dans un style Adria affirmé, le Supersonic se distingue par son design en tous points remarquable, extérieur comme intérieur.
Ses innovations sont nombreuses : des phares Led exclusifs Hella, avant et arrière ; des solutions d’agencements qui privilégient des salons extraordinairement spacieux ; un confort de conduite unique, avec une excellente visibilité. Surtout, nous avons apporté une très grande attention aux détails dans toutes les zones de vie. Plus de deux ans de développement du Supersonic ont été nécessaire afin de répondre aux hautes aspirations des utilisateurs dans cette catégorie de véhicules. »
> Lire aussi : Supersonic, l’intégral de luxe sur Mercedes signé Adria
2) Le porteur Mercedes tire les prix vers le haut, y a-t-il réellement une place pour ces intégraux de luxe sur le marché français ?
« Le marché de l’intégral en France se distingue des autres marchés européens. Le prix y est un sujet beaucoup plus sensible, et le paysage concurrentiel dominé par des marques plutôt françaises. Néanmoins nous sommes déjà bien présents dans l’hexagone avec notre gamme Sonic sur châssis Fiat Ducato, et nous pensons que des gammes d’intégraux de luxe avec des tarifs supérieurs à 150.000 € ont également leur place.
Avec le Supersonic nous avons l’opportunité de proposer un intégral de 4,5 t avec des fonctionnalités et une esthétique dignes d’un Liner, mais des performances et une pratique plus accessibles. Nous savons qu’un tel segment nécessite une approche différente, notamment un produit d’exception à la finition parfaite, mais aussi un réseau bien formé et impliqué. Le Supersonic arrivera en France avec deux implantations auprès de nos meilleurs concessionnaires qui en assureront la présentation et le service après-vente. »
3) Vous lancez le Supersonic, pourtant de nombreux clients français attendent leur camping-car Adria commandé depuis plus d’un an, que pouvez-vous leur dire ?
« Avant tout, nous tenons à nous excuser auprès de tous nos clients qui attendent depuis trop longtemps leur camping-car. Et je profite de cette occasion pour leur assurer qu’Adria travaille d’arrache-pied tous les jours pour maintenir la production en marche. Et surmonter la pénurie d’approvisionnement, notamment de châssis, une situation jamais vue.
Nous faisons tout pour produire et livrer les véhicules précommandés dans les prochains mois. Nous recevons les châssis au compte goutte, chacun avec des caractéristiques particulières qui ne permettent pas de répondre rapidement à certaines commandes, ce qui peut expliquer de grandes disparités entre certains modèles disponibles et d’autres en attente. »
4) Comment Adria compte s’adapter aux bouleversements actuels du marché : forte demande, hausse des prix, pénuries de matériaux, et délais de livraison rallongés ?
« C’est toute l’industrie des Véhicules de Loisirs qui a été soudainement touchée, il y a quelques mois personne n’avait pu anticiper ces pénuries. C’est une situation inédite pour tous, même pour les plus anciens du secteur. Malheureusement nous n’avons pas de solution miracle à apporter, mise à part la persévérance des équipes d’Adria pour maintenir l’activité à un niveau acceptable pour soutenir nos employés, fournisseurs et clients.
L’avantage d’Adria, avec son large catalogue, pourrait être de se concentrer sur les modèles et châssis présentant le moins de contrainte d’approvisionnement, mais cela désorganiserait notre production et créerait un goulot d’étranglement avec une demande concentrée sur quelques modèles, donc une grande dépendance sur quelques fournisseurs et un risque accru de ne pas pouvoir honorer la demande.
Le plus gros problème à venir, à côté de l’approvisionnement en châssis, est l’inévitable augmentation des coûts des matières premières chez nos fournisseurs qui nous sera répercutée. L’industrie du camping-car devra absolument en tenir compte au niveau du prix final, afin de ne pas freiner les clients, qui vont être dans tous les cas impactés par une baisse du pouvoir d’achat avec l’actuelle inflation. »
5) Cette dernière saison Adria s’est hissé n°2 du marché des véhicules de loisirs en Europe, avec 16.061 ventes et 6,3% de PDM, comment expliquez-vous cette performance ?
« Ces bons chiffres sont à regarder dans le rétroviseur ! Nous avons eu des résultats exceptionnels mais il faut se concentrer sur le présent. C’est sûr, on ne va pas ne vas bouder notre plaisir avec ces bons chiffres sur la dernière saison. Ventes qui prennent en compte les marques distinctes et non les groupes, précisons-le. Elles nous placent numéro 2 sur le segment des caravanes, camping-cars et vans, en Europe, Grand-Bretagne incluse, juste devancés par Volkswagen, un constructeur automobile .
Ces deux dernières années nous avions déjà dépassé les autres grandes marques de camping-cars en Europe, profitant des forts taux de croissance du secteur. C’est le fruit de plusieurs années de travail et de stratégie de distribution sur tous les marchés européens. Mais aujourd’hui est un nouveau jour. Pour cette nouvelle saison nous devons concentrer toute notre énergie sur la livraison des commandes en cours, c’est le plus important pour nous. »
6) A la place de n°1 occupée par VW et California, vous répondez que vos fourgons Twin sont des “California avec une douche”, vous pensez sérieusement que le fourgon slovène peut concurrencer le van allemand ?
« Vous avez raison pour VW et California, leur croissance a été exceptionnelle ces dernières années, même si parfois sur certains marchés ces immatriculations posent questions, bref les statistiques officielles sont ce qu’elles sont. La tendance dans la catégorie des vans et fourgons aménagés attire de nombreux nouveaux utilisateurs, en particulier les jeunes entrant dans vanlife auxquels VW California s’adresse depuis des années. Lorsque nous avons lancé notre nouvelle génération de fourgons Adria Twin il y a quatre ans, nous avions précisément en tête ce public cible.
Nous avons développé des produits spécifiques, parfois inédits, toujours avec l’ADN de la marque Adria et l’esprit d’aventure. Nous attirons de nouveaux clients de campervans et leur donnons tout le confort dont ils ont besoin, y compris la douche et les toilettes ! Nos aménagements sont bien étudiés, avec de nombreux petits détails, que les concurrents ne proposent pas, ni le VW California vu son espace réduit. La marque Adria a son propre style qui répond aux besoins réels des clients qui veulent voyager en toute autonomie. C’est pourquoi notre segment van a augmenté de manière significative au cours des trois dernières années. Nous ne sommes pas si loin d’être une marque de fourgon leader en Europe, si l’approvisionnement en châssis fonctionnait, nous pourrions répondre à plus de demande. »
> Lire aussi : Adria Twin Sports avec toit relevable
7) En complément de l’usine de Novo mesto, Adria vient d’ouvrir une nouvelle usine dédiée aux vans, quelles sont vos ambitions ?
« Nous avons décidé il y a plus d’un an de répartir la production des fourgons sur un nouveau site. Notre usine de Novo mesto avait simplement atteint son plafond en capacité de production. La nouvelle usine de fourgons à Bič a démarré il y a deux mois et fonctionne déjà parfaitement, l’usine a fourni beaucoup plus d’espace pour les lignes de production de fourgons, et assure une meilleure qualité également liée à un flux de matériaux plus efficace.
Cette usine offre également de meilleures possibilités de croissance future pour les vans, la demande du marché et l’offre de châssis le dicteront. Mais le plus important, la relocalisation des vans vers un nouvel site, offre à l’ensemble de la chaine de production Adria un espace de travail mieux adapté aux volumes croissants de camping-cars et de caravanes produits ces deux dernières années. Volumes que nous aurons certainement à l’avenir, selon l’évolution du marché. »
8) Créée il y a plus de 50 ans en Slovénie, Adria a été rachetée en 2017 par le groupe Trigano, qu’est-ce que cela a changé pour la marque ?
« L’histoire d’Adria est passionnante, avec de nombreuses étapes de développement depuis 1965. Je ne peux commenter qu’à partir de 2008, lorsque j’ai rejoins Adria comme directeur exécutif des ventes et du marketing. En tant que société slovène indépendante, nous sommes en mesure d’être compétitifs sur plus de 30 marchés en Europe et dans le monde, grâce à nos partenaires de distribution. Comme Socanor importateur exclusif en France depuis de nombreuses années. Nous avons développé des gammes de produits très attractives dans toutes les catégories, camping-cars, caravanes et vans, et tous les niveaux de prix. Nous avons augmenté notre chiffre d’affaires chaque année, avec de solides résultats financiers au cours de la dernière décennie, et plus de 500 revendeurs dévoués qui croient en notre stratégie.
Avec l’acquisition de Trigano en 2017, cet aspect n’a pas changé. Nous apprécions de pouvoir garder un certain niveau d’autonomie, notamment pour nos marques, nos produits et la distribution. Nous développons et produisons tous nos véhicules indépendamment dans notre usine. M. Feuillet a montré un grand respect pour notre réussite, il a acquis une entreprise prospère et performante, nous avons donc conservé un statut un peu différent dans le groupe. Nous apprécions cela, et nous mettons en place ensemble toutes les synergies possibles et partage de savoir-faire au sein du groupe. Enfin, avec la nouvelle direction de Trigano, nous essayons de surmonter ensemble tous les défis actuels de l’industrie, la confiance et le respect mutuels sont plus importants que jamais. »